Le Jeudi saint : L’institution de l’Eucharistie
La messe de la Cène du Seigneur, dans la soirée, commémore l’institution de l’Eucharistie. Elle ouvre le Triduum pascal. Après l’homélie, le célébrant procède au rite du lavement des pieds, qui reproduit le geste du Seigneur (cf. Jn 13, 3-17). A la fin de la messe, le Saint-Sacrement est porté en procession jusqu’au reposoir : il est bon que, jusqu’à minuit, les fidèles poursuivent, les uns après les autres, leur adoration, méditant les discours après la Cène, testament du Seigneur qui s’est livré pour le salut de tous.
La bénédiction du pain et du vin
Lors de ce repas d’adieu, Jésus prend le pain en remerciant Dieu son Père et le partage à ses disciples en leur disant : « Prenez et mangez-en tous : ceci est mon corps livré pour vous » (Mc 14, 22). Puis à la fin du repas, il prend la coupe de vin. De nouveau, il rend grâce et la donne à ses disciples en disant : « Prenez et buvez en tous, car ceci est la coupe de mon sang, le sang de l’Alliance nouvelle et éternelle, qui sera versé pour vous et pour la multitude en rémission des péchés. Vous ferez cela en mémoire de moi » (Mt 26, 26-29). Pour Jésus, ce n’est plus par le sang des animaux que se conclut l’Alliance entre Dieu et les hommes, mais par sa vie.
Quelle est la signification de la Cène ?
Le contexte de la Cène est celui d’un repas quasi liturgique comme celui pris par les confréries religieuses juives. On y faisait mémoire de l’Exode, on y célébrait la présence active de Dieu et de son Peuple, on attendait le Royaume. Ces repas étaient un authentique culte rendu à domicile. Marc, l’évangéliste, interprète le dernier repas de Jésus (Mc 14,22-25). Il met en scène la Pâque de Jésus qui pour lui, va accomplir celle d’Israël.
Pour Marc, il s’agit d’un véritable passage, celui qui va du rituel juif au rituel chrétien. Pour ses disciples, Jésus par ces paroles identifie son corps et son sang au pain et au vin. Sa mort prochaine est un nouveau sacrifice pascal. Ce repas est pour Marc et, à sa suite, Luc et Matthieu, celui de la fête du Messie, sa Pâque, son passage de la mort à la vie et la libération qu’elle offre à ceux qui la mangent avec lui.
Autre moment important de ce dernier repas : Jésus lave les pieds de ses disciples. Il s’agenouille devant chacun des douze, leur témoignant ainsi la tendresse qu’il a pour eux. Ce geste du lavement des pieds est repris durant la messe du Jeudi saint. Dans beaucoup d’églises, la liturgie de la cérémonie du Jeudi saint commence par ce rite du lavement des pieds. Le prêtre s’agenouille et lave les pieds de douze fidèles.
La célébration liturgique du Jeudi saint
« Vous ferez cela … » Tout commence avec cet ordre du Seigneur rapporté par Paul (1Co 11, 24) et Luc (Lc 22, 19). Les disciples, en refaisant les gestes de la Cène, vont faire revivre les événements de la Passion et de la Résurrection de Jésus. Cela se passe d’abord de manière orale, comme des témoignages. Puis vient le temps de les écrire pour les générations futures.
Les récits de l’institution de l’eucharistie sont mis par écrit plusieurs années plus tard. Le plus ancien est celui de Paul et date de l’an 55. Ces récits n’ont d’autre but que de permettre aux premières générations de chrétiens, d’approfondir le sens de« rompre le pain » en lien avec le dernier repas de Jésus. Au début de l’Église, du premier au troisième siècles, les communautés chrétiennes célèbrent la Cène dans la discrétion de la vie domestique de maison ordinaire, notamment pour échapper aux persécutions romaines. Au quatrième siècle, avec l’édit de tolérance de la foi chrétienne promu en 313 par l’empereur romain Constantin, la messe va sortir d’une forme de clandestinité pour être célébrée dans les églises où le nombre de chrétiens ne fait qu’augmenter.
François Le Roux (Le Jour du Seigneur)